Factory Loops Factory Looms
Performance. Hyperfestival, Paris, 2021.
Syd Rey, Angelo Mucciante & Barbara Bracci.
Produced by Hyperfestival, Paris
Proposition de création autour de la musicalité du corps au travail associant une chorégraphe (Barbara Bracci), une artiste plasticienne (Marion Mucciante) et un compositeur (Syd X. Rey), Factory looms, factory loops prend comme point de départ une collection d'interviews de membres d'une communauté d'ouvriers et d'enregistrements sonores réalisés en 2018 dans la chaîne de production d'une usine de fabrication de feutres textiles. Elle interroge la musicalité des corps abandonnés à leur ennui, des corps souffrants, des corps jouissants ou aux gestes routiniers, des corps imparfaitement fonctionnels ou dysfonctionnels. Elle questionne également la façon dont cette communauté d'ouvriers se structure elle-même autour d'une relation forte entre geste et musicalité. Elle se propose d'y répondre en considérant deux échelles sociologiques distinctes :
d'une part celle du corps intime, en investiguant le lien entre le geste intime et la musicalité impalpable des machines de chaînes de production modernes, celle qui va au-delà des motifs rythmiques répétitifs et routiniers, celle qui se cache dans les interstices sonores, les mélodies infimes et déstructurées transpirant (souvent assourdie par des bouchons d'oreilles) au travers du "derme" des bruits de vérins, d'engrenages, de pistons, de courroies, et qui raconte une autre intimité du quotidien ;
d'autre part celle du corps collectif, en convoquant le geste dansé comme matériau structurant le groupe, notamment à travers l'influence des bruits des machines sur les mouvements conscients et inconscients des ouvriers.
Le loom, le métier à tisser mécanique, fournit le matériaux sonore et chorégraphique. Mais en anglais, loom est aussi la forme vague qui rôde et se matérialise en émergeant du brouillard.
Le matériau sonore est restitué en live sous forme de loops de samples enregistrés en usine puis découpés, copiés, collés, filtrés, pitchés et stretchés, mosaïqués. Y répondent des instruments acoustiques adaptés d'objets électroménagers, de petites machines-outils et d'ustensiles du quotidien dont la musicalité répond à celle des machines de grandes chaînes de production. Dans cette mise en correspondance, nous interrogeons le continuum entre sphère privée et sphère professionnelle dans une époque qui veut faire accroire une séparation parfaitement étanche entre les deux.
Le matériau chorégraphique est à l'origine d'une véritable enquête scientifique voulant aboutir à l'invention d'un langage chorégraphique directement inspiré des mouvements rotatifs, linéaires et répétitifs des rythmes des métiers à tisser. Ce langage vise notamment à se détacher d'une danse organique et dynamique et à se focaliser sur les mouvements mécaniques et périphériques. Il souhaite également théâtraliser le geste ouvrier, lui donner une résonance qui laisse transparaître une mathématique du geste.